INTERVIEW POINT BANQUE
- Quels atouts disposent les banques par rapport aux assureurs pour le contrat d’assurance vie ?
L’assurance vie représente 60% des actifs financiers des Français ainsi qu’une grande partie des commissions des banques et un aspect important de la diversification. L’un de ses atouts majeurs pour le banquier est qu’elle est perçue par le public, comme de l’épargne et les banques sont mieux placés que les assureurs pour la proposer. L’autre atout des banques tient en leur connaissance du stock patrimonial de leurs clients. A la fois l’ensemble de leurs avoirs et la partie immergé de l’iceberg, c'est-à-dire l’épargne disponible qui n’est souvent pas gérée.
- Des éléments patrimoniaux que l’assureur ne connait pas !
Non, il ne connait que les divers contrats d’assurance : habitation, automobile ou prévoyance. La relation bancaire doit donc être solide et basée sur la confiance et l’empathie que le client est capable de développer à l’ égard de son conseiller patrimonial. Il ne faut pas oublier que si pour l’ instant, changer d’assureur est beaucoup plus facile que de changer de banquier, les choses vont évoluer avec les nouvelles dispositions de la loi Macron. Le banquier à tout intérêt à resserrer davantage sa relation avec son client et le contrat d assurance vie est un ciment idéal.
- Qu’est ce qui pêche aujourd’hui dans la relation bancaire ?
Il faut progresser dans l’ approche du client. Aujourd’hui, les conseillers travaillent vraiment sur cet aspect. Car il ne faut pas oublier que le client a un préjugé favorable envers son conseiller bancaire qui est perçu comme étant à l’écoute. Ce dernier va proposer des options alors que l’assureur est mono-produit.
- Le mode de distribution est aussi à prendre en considération ?
Oui car les courtiers et agents d’assurance sont mono-produits et auront toujours tendance à regarder la commission. Or, la perception des rétro-commissions par le public est de plus en plus difficile avec les nouvelles directives européennes comme les MIF. Par contre, le conseiller bancaire est salarié et sa préoccupation commerciale est de remplir certains objectifs et surtout de participer à l équilibre financier du groupe, ce qui n’est pas du tout le cas du courtier ou de l’agent.
- L arbitrage est important aussi ?
En effet car le client pourra arbitrer avec son conseiller bancaire sur ses divers contrats d’épargne et alimenter ou alléger le contrat d’assurance vie car le banquier offre une palette de services tournant autour du contrat qui constitue une vraie valeur ajoutée. Le banquier est plus à même de proposer des outils financiers puisque c’est lui qui les gère alors que l’assureur sous traite par exemple, tout ce qui est support en unité de compte. Ensuite, l’un des points très importants dans cette relation cimentée autour de l’assurance vie est le respect à la lettre de l’obligation d’information par le conseiller bancaire qui va aussi établir un diagnostic patrimonial et délivrer une information précise au client. Il préviendra le client sur les risques en appliquant les normes de l’AMF et de l’ACPR ce qu’est loin de faire l’assureur. Les condamnations des tribunaux sont nombreuses dans le domaine du courtage pour défaut d’information.
- Que faut-il préconiser pour différencier le conseiller bancaire ?
Il faut raisonner en termes de besoins et non en termes de produits. Ce qui revient à dire qu’il ne faut pas vendre un produit d’assurance mais convaincre le client de l’acheter c'est-à-dire lui faire ressentir ce besoin et l’aider à l’exprimer lui-même. C’est ce que l’on appelle la maïeutique qui consiste en matière bancaire, à aider le client à accoucher lui-même de son besoin.
- Est-ce que les banques se livrent à cet exercice de maïeutique ?
De plus en plus. Le banquier doit présenter l’assurance comme un acte d’épargne et non comme un produit qui s’accumule avec d’autres comme dans un lego, chose que fait l’assureur. Et dans cet acte d’épargne, l’épargnant et surtout le senior plus intéressant financièrement, doit être considéré comme un sachant. Le conseiller bancaire pourra lui parler de son contrat d’assurance-vie à l’occasion d’une nouveauté, d’une limitation de la règlementation ou à l’inverse, d’une ouverture. Un lien permanent se créé donc à partir du contrat d’assurance vie et de son actualité.
- La psychologie du client est aussi à prendre en compte ?
Oui car l’un des traits marquants du client est sa peur de manquer. C’est devenu un phénomène très important qui fait même l’objet de séminaires dans les universités et les écoles. Pour contourner cette difficulté, le banquier doit mettre en évidence la souplesse du contrat c'est-à-dire la possibilité d’obtenir des revenus avec des retraits et des avances. D’ailleurs, celles-ci ne sont pas suffisamment mises en avant. Elles sont pourtant très intéressantes car l’épargne continue à être rémunérée et le client peut continuer à verser de l’argent sur son contrat.
- L’assurance vie va permettre un langage permanent entre le conseiller bancaire et son client ?
Oui ça va plus loin encore car à partir de son contrat d’assurance vie, le banquier va proposer à son client d’autres équipements car le support d’assurance vie peut tout loger aujourd’hui. Plutôt que d’acheter des SICAV et des OPCVM directement, autant les mettre dans le contrat d’assurance vie ! C’est donc en premier la souplesse que le banquier doit vendre et surtout ne pas lui dire que le contrat est bloqué 8 ans car ce n’est pas vrai. C’est dans l intérêt des banquiers de prévenir les clients qu’ils peuvent sortir de l argent de leur contrat d assurance vie quand ils veulent car le client aura alors tendance à le réalimenter.
- Les banques font de plus en plus d’ efforts dans ce sens ?
Tout à fait et le conseiller doit tenir compte des motivations des clients et ne pas appuyer sur l’approche risque comme le fait l’assureur car l’assurance vie ce n est pas du risque c est de l’épargne. Et on ne devrait même pas employer le nom d’assurance vie mais parler plutôt de capitalisation car à l inverse de l assureur, cela permet de ne pas affronter frontalement le décès. Des détournements simples peuvent être mis en place comme demander au client sil a réfléchi aux conséquences financières qu’entrainerait son éventuelle disparition. Là, on ne parle pas frontalement de décès. Alors que l assureur dit « je vous protège en cas de décès ». En bref, le banquier peut faire avec le contrat d’assurance vie l’équivalent d un vêtement de grand couturier. Il doit faire du sur mesure.